AG2023_1066443a or shadow, imagination, and freedom

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“There is a tree, by day,
That, at night,
Has a shadow,
A hand huge and black,
With fingers long and black.”

Angelina Weld Grimké, Tenebris



“To be free after all, is not to be undisciplined. I should say that the discipline of the imagination may in fact be the essential method or technique of both art and science.
[…]
To discipline something, in the proper sense of the word, does not mean to repress it, but to train it–to encourage it to grow, and act, and be fruitful, whether it is a peach tree or a human mind. “

AG2023_1077735a or meaning knows

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I now replace desire
with meaning.
Instead of saying, I want you, I say,
there is meaning between us.
Meaning can swim, has taken lessons from the river
of itself. Desire is air. One puncture
above a black lake and she lies flat.
I now replace intensity with meaning.
One is a black hole of boundless appetite, a false womb,
another is a sentence.
[…]
Meaning knows …

Megan Fernandes, Friends with No Benefits


“The film, like life itself, had minimal

plot and extraordinary beauty.

The film, like life itself, was

slow and maniacal.”

Jennifer Bartlett, From “The Hindrances of a Householder”

nos poètes, nos rêveurs, nos fous indomptés

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« Je condamne les violences commises par le Hamas, je les condamne sans la moindre réserve. Le Hamas a commis un massacre terrifiant et révoltant », écrit Judith Butler avant d’ajouter qu’« il serait étrange de s’opposer à quelque chose sans comprendre de quoi il s’agit, ou sans la décrire de façon précise. Il serait plus étrange encore de croire que toute condamnation nécessite un refus de comprendre, de peur que cette compréhension ne serve qu’à relativiser les choses et diminuer notre capacité de jugement ».

[…]

une des raisons de ce désespoir est précisément qu’ils regardent les médias, et vivent dans le monde sensationnel et immédiat de l’indignation morale absolue. Il faut du temps pour une autre morale politique, il faut de la patience et du courage pour apprendre et nommer les choses, et nous avons besoin de tout cela pour que notre condamnation puisse être accompagnée d’une vision proprement morale.

[…]

Personnellement, je défends une politique de non-violence, sachant qu’elle ne peut constituer un principe absolu, qui trouve à s’appliquer en toutes circonstances. Je soutiens que les luttes de libération qui pratiquent la non-violence contribuent à créer le monde non-violent dans lequel nous désirons tous vivre. Je déplore sans équivoque la violence, et en même temps, comme tant d’autres personnes littéralement stupéfiées devant leur télévision, je veux contribuer à imaginer et à lutter pour la justice et pour l’égalité dans la région, une justice et une égalité qui entraîneraient la fin de l’occupation israélienne et la disparition de groupes comme le Hamas, et qui permettrait l’épanouissement de nouvelles formes de justice et de liberté politique.

Sans justice et sans égalité, sans la fin des violences perpétrées par un État, Israël, qui est fondé sur la violence, aucun futur ne peut être imaginé, aucun avenir de paix véritable – et je parle ici de paix véritable, pas de la « paix » qui n’est qu’un euphémisme pour la normalisation, laquelle signifie maintenir en place les structures de l’injustice, de l’inégalité et du racisme. Un pareil futur ne pourra cependant pas advenir si nous ne sommes pas libres de nommer, de décrire et de nous opposer à toutes les violences, y compris celles de l’État israélien, sous toutes ses formes, et de le faire sans avoir à craindre la censure, la criminalisation ou l’accusation fallacieuse d’antisémitisme.

Le monde que je désire est un monde qui s’oppose à la normalisation du régime colonial israélien et qui soutient la liberté et l’autodétermination des Palestiniens, un monde qui réaliserait le désir profond de tous les habitants de ces terres de vivre ensemble dans la liberté, la non-violence, la justice et l’égalité. Cet espoir semble certainement, pour beaucoup, impossible ou naïf. Et pourtant, il faut que certains d’entre nous s’accrochent farouchement à cet espoir, et refusent de croire que les structures qui existent aujourd’hui existeront toujours. Et pour cela, nous avons besoin de nos poètes, de nos rêveurs, de nos fous indomptés, de tous ceux qui savent comment se mobiliser.

Condamner la violence Par Judith Butler (traduit de l’anglais par Christophe Jaquet; AOC)